Comme le souligne Jennifer Debatisse dans ce post l’intelligence collective, ou plutôt le terme d’’intelligence collective’ est maintenant promu comme un dogme. On le voit placardé systématiquement comme principe fondamental de fonctionnement de la plupart de nos entreprises.
En réalité, ce principe est mal compris et, le plus souvent, mal appliqué, alors qu'il est -me semble-t-il - simplement VITAL pour la suite de notre histoire.
Je me permets d’en rappeler ici les fondamentaux.
Qu’est-ce qu’est l’IC (Intelligence Collective) ?
C’est le principe, que lorsque vous mettez un certain nombre de personnes ensemble pour résoudre ou avancer sur une problématique, sous certaines conditions, les décisions ou avancées qui vont émerger seront plus sages, plus intelligentes, plus justes et vont s’inscrire dans une optique à plus long-terme, que celles prises par une personne seule. De nombreuses études ont été faites sur le sujet. On a par exemple étudié les décisions prises par une personne au QI élevé versus une assemblée dont toutes ont un QI ‘faible’. Les résultats sont sans appel.
Oui, mais …
Les conditions sont clefs. Si vous mettez x personnes dans une pièce face à un problème, sans que le contexte ne soit là, on aura, comme l’écrit Jennifer Debatisse, un brouillard intellectuel … La voix du plus fort l’emportera, etc .... C’est le schéma de 90% des réunions en entreprise.
1. Les conditions clefs …
👉 La première, par-dessus toutes les autres, est le taux de présence de femmes. Plus il y a de femmes, mieux cela fonctionne. En fait, plus que de femmes (mais quand même, cela interroge 😮 ), c’est de principe féminin dont il est question : capacité d’écoute, empathie. Inévitablement, tant que l’équilibre n’est pas là, c’est compliqué.
👉 La seconde est la parole libre. Créer un contexte dans lequel chacun peut librement s’exprimer, sans jugement, sans conséquence, sans pressions. Là, on comprend que l’organisation pyramidale des entreprises est un frein colossal à l’IC.
👉 La troisième est le cadre : mettre en place un déroulement organisé, permettant l’exercice de la parole de chacun, l’écoute, l'approfondissementet et remettant les egos à leur juste place. Ce cadre, en particulier, impose un temps long, ce qui va - à court terme - à l’opposé de notre recherche de soi-disant ‘performance’. C’est parce ques ces techniques sont nouvelles (mais simples) que l’on fait appel à des ‘facilitateurs’.
Il y en a d’autres, mais ce sont les principales.
2. L’effet indirect : l’engagement
Comme le synthétise si bien Jacques Forest , (sociologie des organisations, UQAM), parmi les 3 besoins fondamentaux psychologiques clefs de l’homme (on affine Maslow), il y a l’Affiliation = je fais partie de. “J’ai participé au choix de la direction que prend ce navire”. Je prends part aux décisions ayant un impact collectif. Ce navire est mon navire. On comprend bien les facteurs aggravant de démotivation, de désengagement qu’inévitablement les organisations à structure hiérarchique ‘classique’ imposent. On comprend aussi bien un des facteurs clefs clefs du taux de ‘burn out’ actuel.
⛵ Contrairement à ce que l'on peut croire, les marines modernes fonctionnent sur des modes profondément participatifs. C'est simple, sinon c'est la mutinerie.(Sauf en situation de danger extrême. J'encadre à l'école de voile des Glénans. Je ne donne jamais aucun ordre. Sauf quand un équipier se met à risque physiquement ou quand le bateau risque de s'abimer).
🧐 Il ne peut y avoir de mise en place authentique de démarche d’Intelligence collective s’il n’y a pas eu un travail sur soi, un travail de fond, du ou des dirigeants. Un travail qui leur aura permis de prendre leur juste place, et de ne pas se noyer dans des questions d’ego, de pouvoir, d’avoir ... Vaste sujet, certes.
☠ Lorsqu'une décision est prise sur un mode authentiquement collectif, alors elle est proprement appliquée par tous. Lorsqu'une décision est prise en mode 'majorité', sur les 49% contre, la moitié ne va pas mettre ses pagaies à l'eau, et l'autre va ramer en sens inverse. Donc non seulement la décision est potentiellement moins bonne, mais elle est en plus mal appliquée.
Demain, votre entreprise.
Nous sommes allés au bout de la question individuelle (sur le plan économique). Nous ne pouvons plus avancer que collectivement. Il n’y aura pas de ‘transition’ sans, au préalable une mise en place authentique d’organisation collective ( interne / externe) dans nos entreprises. Si vous en doutez, interrogez vos jeunes recrues. C’est pour cela qu’il est clef pour les dirigeants de (1) comprendre les clefs de l’intelligence collective (2) de plonger en soi. Ou l'inverse plutôt.